[FLASHBACK]
- « Un psy !???? Tu veux vraiment que j’aille là-bas ??!
- C’est ma condition Lavi. Si tu refuses tu resteras enfermé au temple sans la possibilité d’avoir de visite.
- En fait t’as envie de me jeter dehors mais c’est plus simple si c’est moi qui décide de partir ?
- Ne dis pas ça, j’essaye de t’aider voilà tout.
- En me disant que je suis fou ? Lorsque je suis arrivé ici tu m’avais promis de rester avec moi et de me soutenir ! Comment peux- tu rester si calme alors que tu veux expédier ton seul petit fils loin de toi, dans une ville où il sera seul ?
- Je ne prendrai pas de telles mesures si j’étais sûr que tu étais encore cet enfant que j’ai accueilli... »
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Ce fut les dernières paroles de mon grand-père avant mon départ pour Kyoso. Finalement il avait gagné, j’étais assis sur ce banc devant la porte du psychologue pour la sixième fois depuis mon arrivée. Pourquoi cherchait-il tant que ça à ce que je redevienne le pauvre garçon sans âme que j’étais à l’époque ? Toujours le regard vide, préférant la solitude et le silence aux groupes d’amis et aux bruits assourdissants des villes. Après tout on ne m’avait jamais vraiment demandé mon avis, et si je préférais continuer de me voiler la face sur ce qui me parait insurmontable encore aujourd’hui ? C’était mon droit merde. Puis c’est plutôt cool d’être aimé par la plus part des gens, avoir pleins d’amis, sortir avec les filles que je voulais, faire la fête, aller trainer dans les bars, parler à des inconnus de tout et n’importe quoi sans aucun tabou, ou presque. C’était le nouveau moi et je ne voulais pas l’abandonner même si j’étais pleinement conscient qu’il me faudrait tôt ou tard affronter mes problèmes je restais persuadé que le plus tard aurait été bien mieux.

Alors voilà, je me retrouvais encore devant cette foutue porte qui me blesserait à nouveau de façon irrémédiable. Ce qu’il y avait de différent cette fois c’était que je n’avais plus mon cache œil, comme promis à la dernière séance je l’avais retiré pour aujourd’hui. Par manque d’acceptation j’avais cependant volontairement omis de relever mes cheveux pour que ma mèche cache cette douloureuse mutilation. Complètement déprimé et perdu dans mes pensées j’avais la tête basculée en arrière collée au mur, mes yeux scrutaient le plafond pendant que mes mains retombaient entre mes jambes légèrement écartées. Si je devais expliquer à ce psy ce qui me mine vraiment le moral je crois que je lui écrirais le récit de notre rencontre. En temps normal je ne laissais voir aux gens que le côté souriant, enjoué, cinglé de ma personne et pas cette chose fade qui se cache derrière ma carapace. Grand-père avait tort, Lavi n’a pas disparu. Il se cache dans un monde plus beau voilà tout, un monde où il a trouvé sa place, où il n’a plus peur d’être blessé injustement. Papi panda aurait dû être fier… c’est comme ça que ça devait se passer, me tapotant sur la tête il m’aurait félicité d’avoir grandi et d’avoir trouvé ma place.


« Merde … »

Mon torse se compressait, plus les minutes passaient plus mon mal être physique s’accentuait. J’étais vraiment obligé d’y aller ? Si je partais là personne n’en saurait rien puis je doutais fort que le psy viendrait me chercher dans ma chambre juste pour une séance débile. C’était important que j’y aille, j’en avais pleinement conscience mais clairement ça m’emmerdait. J’avais beau retourné la question dans ma tête je ne voyais pas pourquoi je devais à nouveau changer ce que j’étais. Non vraiment ça me paraissait insensé mais c’était semble-t-il être la seule solution à mon retour au temple de grand-père. Il me restait encore beaucoup à apprendre avant de prendre sa succession alors ce passage ici n’était qu’une perte de temps. Ce qui m’échappait encore plus c’était pourquoi m’avoir envoyé dans ce lycée ? Si le seul problème était le psy il y avait la possibilité d’en voir un chez moi. Des questions auxquelles je n’avais pas de réponses tournaient dans ma tête comme un cercle infini.

Ce qui me fit sortir de mon monde intérieur c’était une fillette d’environ 14 ou 15 ans peut être qui était assise devant moi. Ma réponse à sa tentative de discutions ne fut sur le coup qu’un crie de surprise et un sursaut. Une petite blondinette engloutie dans un sweat avec un écouteur enfoncé dans l’oreille, voilà ce qui se posait sous mes yeux. C’était la première fois que je croisais quelqu’un dans cet endroit alors troublé par cette nouvelle situation j’essayais d’agir comme je l’aurai fait en temps normal bien que mes pensées douloureuses étaient encore fraiches dans mon esprit. Oubliant totalement l’absence de mon cache œil je souriais d’un air gêné en relevant un peu ma mèche de ma main droite, laissant entre apercevoir l’œil qui ne me servait plus depuis des années de par ce voile immonde qui recouvrait ma pupille et me rendait aveugle.


« Heum… hey. Désolé tu m’as fait peur… »

Ah je l’avais effrayé suffisamment pour qu’elle s’éloigne de moi, mince. Enfin ce n’était pas plus mal, je n’avais pas vraiment envie de proximité physique pour le moment. La petite blondinette avait un air désespéré avec ses petites joues roses et son regard fuyant, j’esquissais un rapide sourire avant de reprendre mon sérieux plus qu’inhabituel. Me sentant violer par ses regards qui m’analysaient je détournais les yeux, ne sachant plus trop où me mettre. En temps normal j’aurai été flatté mais cette fois on me regardait différemment. Ce n’était pas avec des pensées obscènes mais sans doute plus sérieuses et profondes que cette gamine m’observait. Finalement elle décida de s’ouvrir à moi en baissant le son de son mp3, j’étais flatté qu’elle me trouve assez d’intérêt pour ça mais j’allais devoir parler… rien de bien grave cela dit, elle ne semble pas être bavarde ni même être le genre à saouler par des choses inutiles, voilà le genre de relation humaine que je n’avais plus eu depuis bien des années. Elle me rappelait mon ancien moi, renfermée sur elle-même, peu bavarde, peut-être avait-elle peur de quelque chose ce qui l’avait conduit à se forger une carapace. En y pensant c’était logique que quelque chose clochait puisqu’elle se trouvait dans cette infâme salle d’attente qui sentait le vieux malade. A nouveau elle tenta une approche qui m’interpella pour la seconde fois, je voyais facilement à son attitude que les conversations avec des inconnus n’était pas son fort mais ça la rendait, d’une certaine façon, assez mignonne. Parler à une enfant, hmm dur sachant que je ne savais parler aux filles que pour les draguer ‘fin courage ! Je pouvais le faire, il suffisait de se contrôler surtout qu’elle était bien trop jeune pour moi. La clé : des phrases courtes et surveiller mes mots pour ne pas passer pour un gros pedobear. Jouant avec mes mains je laissais entrevoir la gêne que je ressentais tout en la fixant dans les yeux.


« Lavi. Le prends pas mal mais… pourquoi tu me regardes comme ça ? »

Je me pinçais les lèvres pour retenir un « Je te plais ma jolie ? » qui aurait été fort déplacé. Retenir les habitudes que j’avais prise avec les années … si un jour on me l’avait dit je ne l’aurais pas cru possible. Je repliais mes jambes en tailleur sur ma chaise puis posant mes coudes sur mes genoux je joignais mes doigts pour y poser mon menton. Presque aucune expression sur le visage je ne lâchais pas des yeux ma jeune camarade.